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Carnet de route photos - Egypte Partie 14 (et fin)

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Fin du voyage : Nous repartons pour la côte le lendemain, avec un passage éclair dans le musée de la seconde guerre mondiale à El Alamein. Comme dit le fameux guide, "ça ne vaut pas le voyage, mais pourquoi pas le détour".

Sur le plan photographique, c’est la fin du voyage bien qu’il me reste quelques jours. Je profite notamment de la gentillesse de Raed qui doit régler un problème administratif au tribunal d’Alexandrie pour m’incruster, revoir la ville que je n’ai pas visitée depuis… environ 20 ans, ce qui représente quelque chose pour un trentenaire. Et surtout, j’ai envie de voir à quoi ressemble un tribunal dans une grande ville égyptienne très européenne.

 

Évidemment, les gardes à l’entrée ne me laissent pas entrer avec les appareils, c’était prévisible, mais l’expérience reste intéressante. A l’intérieur, les couloirs sont bondés, il règne une agitation manifestement coutumière, des gens courent partout, certains emportant des paquets de dossiers reliés par de la cordelette qu’ils récupèrent sur de gigantesques piles entassées çà et là…

Image extraite du film La Momie (The Mummy) réalisé par Stephen Sommers en 1999. Encore un film qui parle du bordel en Égypte, ça devient dur de parler de coïncidence !

Quelques inévitables mouches apprécient le chaos et les fragrances plutôt désagréables qui règnent dans le tribunal. J’apprends que, comme beaucoup de pays à travers le monde, ils se sont largement inspirés du modèle français. Le bordel égyptien sur la lourdeur de l’administration française. Ça fait rêver…

 

Je me réfugie dans une salle d’attente vide à l’étage où je trie mes images en attendant Raed. Très rapidement, la salle se remplit de quidams, d’avocats et qui sait quoi encore pour finir totalement bondée ! Ça tombe bien, j’adore la promiscuité.

 

Un préposé passe avec du thé, tandis que les conversations dont le contenu m’échappe évidemment, arborent cette finesse si particulière qui veut que chaque groupe d’interlocuteurs se hurle mutuellement dessus pour se faire comprendre, ce qui est bien nécessaire à 30cm de distance. Mon voisin de droite écoute la prière à plein volume sur son portable, quant à celui de gauche, manifestement un avocat, il n’hésite pas à ouvrir ses dossiers littéralement sur mon ordinateur… puis à se curer longuement le nez pour en extraire les rebuts, qu’il envoie valser d’un auguste geste du doigt dans la direction opposée. Sans choquer le moins du monde les cibles potentielles assises en face. J’aime le dépaysement.

 

Après une visite (trop) rapide de la ville et notamment du théâtre romain qui est toujours un site de fouilles, nous dînons dans un restaurant copte du bord de mer où le hasard veut que j’entre au son du syrtaki au milieu d’orthodoxes barbus directement sortis d’une image d’Épinal ! Il ne faut pas avoir peur des clichés. Excellent repas, à base de poissons évidemment, qui réveille des vieux et agréables souvenirs.

 

Le retour au Caire est calme et l’activité limitée. Je ne résiste pas à l’idée de faire un tour au souk Khân al-Khalili le vendredi pendant la prière. La foule est dense évidemment, mais je gardais un souvenir plus émerveillé… c’est pas beau de vieillir. Il n’y a quelques dizaines de marchandises différentes qui se répètent de magasin en magasin, toutes identiques, d’une qualité déplorable, fabriquées en Chine… Je finis par tomber sur une dague abîmée mais au charme « rustique » qui me séduit et le marchand en profite pour en demander un prix absolument exorbitant ! Je repars donc les mains vides.

La balade reste sympathique, d’autant que la superbe mosquée Al-Azhar nous tend les bras à côté. Fondée par les Fatimides, des Chiites, elle conserve des traces de ce courant de l’Islam, notamment au niveau des minarets, malgré la domination des Sunnites environ 150 ans plus tard sous Saladin (Salah ad-Din). Comme vous le savez sûrement, c’est désormais l’un des grands lieux saints des musulmans, leur « Vatican » si on veut taquiner.

 

L’endroit est parfaitement propre, calme et frais, c’est juste un régal ! Notamment après le souk.

Mon hôte, qui m’a accompagné (et même conduit pour être précis), m’explique pendant le retour que le mot « copte » signifierait tout simplement Égyptien. Ça vous la coupe s’pas ? L’explication serait la suivante : comme vous le savez peut-être, la religion chrétienne partie de Palestine est arrivée très tôt en Égypte et a, comme presque toujours, gagné les portions les plus pauvres. Las d’être exploités, ils ont rejeté simultanément la hiérarchie dominante et leur religion. Il y a d’ailleurs un film pas si mal qui évoque cette période : Agora réalisé par Alejandro Amenábar sorti en 2009. 

Image extraite du film Agora réalisé par Alejandro Amenábar en 2009. Entre nous, c'était déjà le bordel...

Lorsqu’Alexandre le Grand et les Grecs s’emparent de l’Égypte, la capitale s’appelle Aegyptah (près de Memphis), « la ville du dieu Ptah ». A cette époque, l’Égypte porte le nom de « Kemet » qui signifie « pays de la terre noire » en rapport avec les terres fertilisées par les crues du Nil. Or les Grecs ne savent pas prononcer le « h », le nom a donc évolué vers « Agyptos » qui perdra sa première syllabe avec le temps, particulièrement dans les langues latines et arabes pour finalement donner le "copte" toujours utilisé (Agyptos --> Gyptos --> Gypt --> Copte). Il désigne alors et pendant longtemps tous les Égyptiens. Le mot « copte » , qui désigne désormais les chrétiens orthodoxes tire donc son origine de là et signifie simplement « les Égyptiens ».

 

Vous éviterez de trop en parler aux coptes qui sont très jaloux de leur « indépendance » et réfutent volontiers cette argumentation, discutable certes, mais solidement étayée.

 

Aujourd’hui (et depuis plusieurs siècles), l’Égypte se dit « Misr » en arabe. Ce changement date de l’invasion arabe et de la séparation, sous la pression de l’envahisseur, du clergé orthodoxe grec pour affaiblir l’influence de l’ennemi. En créant un clergé indépendant, les arabes ont pu accentuer leur contrôle sur le pays et implanter doucement la religion musulmane. Aujourd’hui, les chrétiens seulement ont gardé le nom de « copte ».

 

Le terme de « Misr » viendrait possiblement du nom du petit fils de Noé, Misraïm dans la Thora, qui s’est installé en Égypte après le déluge. Le coran utilise d’ailleurs ce terme de Misr dans 5 versets qui, pour beaucoup, désignent l’Égypte. Des chercheurs ont néanmoins assez récemment pointé du doigt que l’origine étymologique de « Misr » en arabe ancien serait le singulier de « pays » et nom d’Égypte.

 

C’est là que ça devient très amusant, car des textes historiques arabes utilisent le terme de « copte » et non « misr » pour désigner les Égyptiens. Qui plus est, ils ont retrouvé des traces potentielles de l’ancienne tribu « d’Israël » au Yémen, ainsi qu’une montagne très probable lieu de la révélation… à cette époque un roi dont le nom est très confondant avec le terme de Pharaon (Ber aou au lieu de Per Aou en égyptien ancien) aurait maltraité cette tribu… et engendré un exode !

 

Il y a donc une vraie possibilité que l’origine du « peuple » israélien se situe au Yémen et conséquemment que la montagne sacrée, donc le monastère Sainte-Catherine qui y est construit soit simplement une erreur… Donc que les ronces… enfin que le Buisson Ardent qui est pieusement gardé par des prêtres et des « nomades » qui rançonnent les touristes n’existent que suite à une petite bêtise devenue certitude avec le temps. Amusant, non ?

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